Note défouloir
Aujourd’hui j’ai reçu un appel.
Une voix familière… qui l’était plutôt. Alors même si je ne l’identifie pas immédiatement, je réponds avec entrain, jusqu’à ce que mes neurones fassent l’effort de reconnaissance nécessaire (rassurez vous une fraction de seconde m’a suffit pour passer de la voix enjouée à la voix ennuyée, nan parce que je parle sans arrêt de ma mémoire défaillante mais bon, elle oublie pas tout non plus faut pas croire, et avec l’amie qui m’appelle, ex amie plutôt, il y a à se souvenir, et pas que du bon).
- « Je t’appelle parce que sinon tu ne m’appelles pas » Bon ça va, elle a remarqué. Mais déjà je m’agace. Je n’aime pas les reproches, me permet pas beaucoup d’en faire alors j’aime bien aussi qu’on me fiche la paix avec ça.
- « Ben oui je sais, excuse moi, j’ai été pas mal occupée avec les travaux de la maison » Et voilà, je commence à m’excuser. Tout moi ça. L’agacement monte d’un cran, mais c’est à moi que j’en veux de ne pas savoir gérer ce genre de situation. Je décide de faire bonne figure, je poursuis :
- « Ca y est la maison est en vente. »
- « Ah »
Silence Je sens venir les questions et les remarques assassines.
- « Tu sais que c’est loin d’être la meilleure période pour mettre en vente hein ? » me dit-elle d’une voix douce. »
- « Oui, je le sais » Je suis déjà sur la défensive.
- « Non, parce que je te dis ça, c’est que je ne voudrais pas que tu sois déçue, il va sûrement se passer des mois avant qu’elle ne soit vendue. »
- « merci de me rassurer, ça me remonte le moral »
- « non mais ne le prends pas mal, mais bon, en plus le taux du crédit immobilier n’est pas très favorable et puis ta maison c’est une grande famille qui pourra être intéressée, et tu sais bien que les grandes familles évitent de déménager en cours d’année scolaire. »
Putain mais elle va se taire oui ? J’ai l’air d’une môme à qui il faut tout expliquer ? Zut alors !
- « Tu sais quoi ? JE SAIS à quelle clientèle elle s’adresse la maison, je sais tout ça et je sais qu’elle peut AUSSI être vendue très vite. On verra bien, point. »
- « Hum hum et tu la vends cher ? »
- « Non, je la vends moins cher que sa valeur estimée. »
- « Combien ? » Je lui dis le prix. Merde, mais pourquoi je ne suis pas capable de lui dire que ça ne la regarde pas ? La suite ne tarde pas, j’aurais du m’en douter.
- « Euh, je ne voudrais pas te déprimer mais m’étonnerait fort que tu la vendes à ce prix là ! »
- Là je sens la moutarde qui me chatouille le nez. On verra, je crois que tu oublies à quel point elle est grande et tu n’as pas vu les changements en plus. »
- « Ah t’as réussi à tout refaire ? » Etonnement dans sa voix, je lui fais la liste de tout ce que j’ai refait. En énumérant, je me reprends à être toute fière, purée c’est quand même beaucoup hein !
- « Et tu crois que ça a augmenté la valeur de ta maison ? » Je vois d’ici sa moue dubitative, mais j’en ai rien à faire, je sais moi que même pas j’avais une chance de vendre si j’avais pas fait tout ça, ou alors à un prix dérisoire.
- « oui je crois » Je réponds d’une voix ferme en pensant « Et là tu me poses encore une question de ce genre et je te hurle dans l’oreille »
- « Et Barbex a accepté de signer le mandat de vente ? »
- « Et oui ! » Petit apparté, elle me prévient depuis le début qu’il va s’opposer à la vente. C’est simple. Son ex à elle lui a fait les pires misères, en bonne copine, elle me prédit la même chose « c’est pour que tu saches à quoi t’attendre » J’ai eu beau lui répéter en long en large et en travers que la situation n’était pas la même, j’ai bien compris qu’elle me prenait pour une pauvre conne naïve qui allait se faire bouffer toute crue. Ce qui n’empêchait pas la chère bonne âme de me culpabiliser de vouloir divorcer « mais enfin tu es toute sa vie, qu’est ce qu’il va lui rester ? »
Là je me suis permise de lui rappeler qu’elle était un peu censée être mon amie et que si c’était moi qui effectivement prenait la décision, c’était loin d’être un caprice de ma part, parce que bon, je suis pas vraiment du genre à me dire « tiens celui là il ne me plaît plus, je vais en essayer un autre pour voir. J’étais peut-être toute sa vie, mais il a bien fait tout ce qu’il fallait pour tout foutre en l’air. Je sais dans les divorces on rejette souvent la faute sur l’autre, on refuse parfois de voir sa part de responsabilité, mais ici sur mon blog, je dis ce que je pense moi et d’après moi, IL a tout foutu en l’air. Je veux bien assumer l’échec de mes tentatives pour sauver les meubles, mais en même temps, je ne suis pas psy non plus. - « Non mais toi je m’inquiète pas, tu es forte, je m’inquiète pour lui. » S’en est suivi une conversation fort désagréable où je me suis un peu emportée et où elle s’en est pris plein la tête.
Après avoir délibéré avec son mari, elle a admis avoir peut-être été maladroite (Naaaaaaaaaaaaaaannnnnn ! Presque pas ! ) mais que moi j’étais quand même très réactive. Je lui ai prouvé illico que sa théorie était juste en lui disant que le mieux puisque j’étais réactive et elle maladroite, c’était de s’éviter pendant quelque temps et je lui ai raccroché au nez.
Oui, j’étais réactive. Je venais d’apprendre que mon mari frappait les enfants en mon absence, par les enfants et par lui qui a confirmé. Je naviguais de psy en assistante sociale. Je tentais de préserver le lien parental en le persuadant de se faire soigner et après bien des larmes, des promesses non tenues et de nouvelles violences, j’avais, moi la méchante, décidé de divorcer. Alors oui, entendre « mais je m’inquiète pour lui, que va-t-il lui rester ? » m’a été pénible à entendre de la part d’une personne qui se prétendait mon amie.
Et puis je lui en voulais. Une fois, une seule, je lui ai demandé quelque chose. Son mari est est assistant social, c’est quelqu’un de très calme, à l’écoute, qui trouve souvent les mots qui apaisent (comme quoi les contraires s’attirent) Je lui avais demandé de passer à la maison et de parler à Barbidul qui souffrait de ne pas pouvoir exprimer ses sentiments même à son psy. Au lieu de ça, ils se sont mis d’accord qu’il fallait écouter son père qui souffrait de la situation.
Ils sont repartis en hochant la tête d’un air triste « il souffre énormément »
Merci bien du diagnostic hein ! J’étais pas au courant. Bien sûr qu’il souffre et Barbidul il compte pour du beurre ?
Après ça, je ne les ai plus jamais appelés. Mais de temps en temps elle vient aux nouvelles et selon mon degré de réactivité, et son niveau de connerie (ouais maladresse mon œil !) ça se passe plus ou moins bien.
Aujourd’hui réactive, je l’étais. Mais je me suis contrôlée. J’aurais été méchante et je n’ai pas besoin EN PLUS de culpabiliser d’être méchante, même avec quelqu’un qui passe son temps à me chercher. Donc me suis tenue « si si je vous assure je sais faire des fois » Sauf que, face à ce type de personne, si je me sens pas méchante, je me sens conne. J’aurais du être méchante tiens !
Elle me demande des nouvelles des Barbas. « Ils vont bien » Elle ne se satisfait pas de ma réponse laconique, s’étonne. Ben oui, ils vont bien, la situation n’est pas simple, mais j’assure, je leur parle beaucoup. « Ah ça va mieux avec leur père alors ? » « Non , ça ne va pas mieux. » Elle prend un ton navré « Oh là là, les pauvres qu’est ce que ça va donner quand ils seront adultes ? Il risquent d’être perturbés à vie »
- « Ecoute M., ça va donner qu’ils auront des manques qu’ils vont apprendre à gérer, et je serai là pour les aider à ça. Tu vois, si j’arrive à faire en sorte qu’ils aillent bien dans une situation plus que bancale, il y a toutes les chances du monde qu’ils continuent d’aller bien après. Non ils ne seront pas perturbés à vie.
- « Tant mieux si tu y arrives, ça c’est bien. Mais tu arrives à préserver l’image de leur père ? Parce que c’est important ça pour eux»
Alors là mon sang ne fait qu’un tour. Mais bien sûr ! La sacro sainte image du père qu’il faut préserver à tout prix. Je m’emporte : « Alors son image il se démerde avec ! C’est lui qui se la fait son image, moi je me contente de ne pas en rajouter, il la démolit très bien tout seul son image, s’il veut l’améliorer il ne tient qu’à lui. Qu’est ce que tu veux que je préserve ? Il se conduit comme une brute et moi je dis à mes enfants que leur père n’est pas comme ils le voient, comme ils le ressentent, comme ils l’entendent ? Je m’en tape de son image. Je leur raconte comment il était avant, oui, pour qu’ils sachent qu’il a été un père un jour, je fais des prières pour qu’il se ressaisisse et le redevienne, mais je ne leur mens pas. Lorsqu’ils me disent « papa a été injuste » je réponds « oui il l’a été » ou « non, là c’était normal » Je me débrouille avec tout ça du mieux que je peux, mais je m’en tape de valoriser son image, je suis de leur côté à eux, je les entends, je les écoute, je les accompagne, je ne leur mens pas. Et les conseils ça ne m’aide pas. On n’est pas dans la rubrique psy d’un magazine féminin là, on est dans la vraie vie et on fait comme on peut.
Elle se dépêche de changer de sujet.
- « Et toi ta vie personnelle ? » Putain elle va me lâcher oui ?
- « Quoi ma vie personnelle ? »
- « Il y a quelqu’un dans ta vie ? »
- « Non » - « Ah c’est dommage, c’est important pour l’équilibre, en même temps, méfies toi, tu risquerais de refaire les mêmes erreurs. » Nan vous trouvez pas qu’elle est gentille ma copine hein ? Je conclue le sujet d’un « c’est pas ma préoccupation du moment »
Ses conseils elle peut se les garder. La dernière fois, elle m’avait conseillé de prendre un amant plutôt que de divorcer. Mais oui bien sûr, je ferme les yeux sur la souffrance de mes enfants et je vais m’éclater dans les bras d’un amant.
Je vous passe mes tentatives pour détourner la conversation sur sa vie à elle. Visiblement ça l’intéresse bien moins que la mienne. Elle tente un « Tu devrais venir nous voir, ça te changerait les idées et aux enfants aussi. » Je lui réponds :
- « Oui ça changerait les idées des enfants… » et ça c’est vrai, ils adorent son fils, mais les miennes à moi ça j’en doute. Je fais une vague promesse. Pfff quelle lâche je fais ! Et ouf elle a rendez-vous chez le dentiste et me libère.
M’a fallu deux heures de ménage pour me passer les nerfs. Et encore ! A me lire, vous pensez bien que je suis loin d’être calmée. Pourquoi je n’envoie pas paître une fois pour toute une amitié qui n’en est plus une ? Des restes d’affection, des moments où elle a été là quand pas grand monde ne l’était, même si avec le recul, je me dis que c’est surtout son insatiable curiosité plutôt qu’un véritable intérêt qui a expliqué sa présence à un moment difficile pour moi. Et puis je n’aime pas faire de la peine. Je me dis que je vais oublier de lui donner mes coordonnées quand je vais déménager pis voilà. Pas de quoi être fière mais sûr, elle ne me fait aucun bien et lui dire ce que je pense vraiment d’elle ne m’en ferait pas non plus. Alors…
Et puis zut ! Ca fait deux ans que je me bagarre pour nous retaper les enfants et moi, pour retaper la maison et préparer l’avenir. Elle était où pendant ce temps là, à part au téléphone à poser des questions indiscrètes et à prodiguer des conseils non sollicités ? Pas une fois elle ne m’a proposé de prendre un peu les enfants pour me et les soulager. Pas même les deux fois où j’ai du me faire opérer. Alors je serai lâche si je veux, mon énergie je la mets ailleurs. Na !
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