Rentrée
- « Maman, puisque j’ai un réveil maintenant, on peut se réveiller tout seul demain matin ? Et puis t’inquiète pas, on ne fera pas de bruit, on te laissera dormir.»
- « Bien essayé Barbidul, tu peux te réveiller tout seul oui, mais je me lève aussi et je vous accompagne »
Il sourit, savait bien qu’il ne s’en tirerait pas à si bon compte, tente encore un « tu sais en cinquième ce n’est pas obligé que les parents viennent le jour de la rentrée. »
- « Je sais bien, mais j’ai envie de venir »
- « Bon d’accord »
Là c’est moi qui suis étonnée de m’en sortir à si bon compte, même pas il va à la recherche de ses larmes comme il fait parfois pour essayer de m’attendrir. Mince alors ! Mes enfants grandissent !
Jour J.
Lorsque je descends encore toute ensommeillée d’avoir si peu dormi (ben oui zen au dehors, mais dedans ça cogite) je les trouve attablés, en forme, souriants. Barbalala a râlé un peu parce que pour une fois, ils font du zèle dans la salle de bains, prennent une douche alors qu’ils l’ont déjà prise le soir. « Ben quoi ils prennent exemple sur leur maman, commence pas à râler Barbalala. » « Oui ben y en a qui bossent aussi ! »
Tout le monde est prêt, nous partons. Je les laisse me distancer, je sais bien que ma présence de loin leur suffit largement. Moi ce que je veux c’est voir un peu dans quelle classe ils vont être et savoir qui m’a appelée hier. C’est la CPE qui nous accueille. Ouf ! Elle est toujours là, la principale adjointe aussi. Celle-ci, je ne l’ai vue qu’une fois, mais elle avait eu exactement les mots qu’il fallait à Barbidoux pour l’aider à se ressaisir. Bonne nouvelle donc. Cinq parents il y a ! Je me fais la plus discrète possible pour ne pas embarrasser mes barbachéris, les autres parents restent en retrait eux aussi. Nous ont bien élevés nos ados hein ? ;)
Nouvelle principale. Elle n’est pas à l’aise bafouille, les élèves ne comprennent rien au discours trop élaboré qu’elle lit, ça chahute. Elle s’énerve. Bouhhhh j’aime pas la peur, ça mène à tous les excès. Pourvu qu’elle reprenne de l’assurance !
Celui de l’année dernière était gentil, paternel, pas très efficace, genre « Il faut travailler les enfants ! » mais il avait la bonne idée de s’appuyer sur son équipe pour régler les problèmes. Il se contentait de valider les décisions prises. Je crains que celle-ci ne tienne à asseoir son autorité de façon excessive. Bon on verra, ne la jugeons pas trop vite.
La CPE n’a pas changé. C’est un plaisir de la voir faire. Un sourire radieux aux lèvres, elle voit tout, entend tout, fait taire d’un froncement de sourcil, replace dans les rangs d’une petite tape sur l’épaule. Calme et tranquille et si autoritaire à la fois. Elle est vraiment à sa place cette femme.
Chaque prof principal appelle ses élèves. Barbidul est dans la deuxième 5ème « Oh non, encore dans la classe des intellos !» Sourire ravi de Barbasucre. « C’est pour ton bien mon enfant » Bon il est quand même avec un de ses meilleurs copains, ouf je sais à qui m’adresser pour les devoirs pas notés.
Barbidoux reste seul, un peu inquiet, je le vois triturer la manche de son sweat, je lui souris mais résiste à l’envie de m’approcher. Faut pas lui mettre la te-hon ! Je crois qu’il est tout de même content que je sois là, il cherche mon regard à plusieurs reprises. Il est dans la dernière classe. Aucune idée du niveau, mais j’ai frémi en voyant se former la classe précédente. L’ancienne sixième à problème. On prend les mêmes et on recommence. Et ils disent qu’ils visent l’équilibre ! Quelle hypocrisie tout de même ! Egoïstement je pense juste que les miens y ont échappé.
Barbidoux est avec son meilleur ami et en plus celui que moi je préfère. Ben oui j’ai mes chouchoux moi aussi. Même que c’est aussi le chouchou d’Alice ;)
Les élèves ayant suivi leurs profs, la principale nous invite à prendre un café. Elle est plus à l’aise avec les parents. On papote un peu. La principale adjointe nous rejoint. Je lui parle de l’appel de la veille. C’est une personne du secrétariat que j’ai eu. Bon, ça va, ce ne sera pas une correspondante habituelle. Elle me rassure « Et puis les années se suivent et ne se ressemblent pas, vous verrez ! »
Je rentre à la maison tranquillisée « mais où j’ai mis mes clefs ? » Ah ben je les ai pas, et Barbalala est partie en fermant à clé forcément, et pour une fois je n’ai pas oublié une fenêtre ouverte. Je l’appelle au secours. La pauvre rebrousse chemin mais elle était déjà bien loin, va me falloir attendre. Bon zen on a dit, en plus elle a même pas râlé Barbalala, je m’achète un magazine, il fait beau, je m’allonge au soleil sur la terrasse.
Les barbamours rentrent me raconter. Ils sont contents de leur classe, contents de leur emploi du temps. Tout va bien. Je remplis tout de suite les fiches, couvre les livres, les écoute me raconter encore et me dire qu’ils sont décidés à travailler. Je bois du petit lait.
Et puis une visite, des acheteurs potentiels. La maison a l’air de les emballer. Le mari me glisse que la maison plaît à madame. Moi je ne m’emballe pas, je me doute bien qu’ils vont en voir d’autres. Mais pour une première vraie visite, c’est réconfortant.
La femme de l’agence me l’a confirmé au téléphone, la maison leur a beaucoup plu mais ils ne connaissent pas le 95, craignent un peu le dépaysement, ils sont du 92, ils veulent d’abord en voir d’autres.
J’ai rien foutu de ma journée aujourd’hui. Première vraie journée seule, je savoure. Pas d’appel du collège. Barbidul rentre. Il me dit qu’il y a malheureusement un mot à signer. Mon oreille a saisi malheureusement, je m’inquiète « euh pourquoi malheureusement ? » « Ben parce que c’est chiant les mots à signer non ? C’est encore pour des fournitures » « Aaaaaaaaaaaaaaaaaaahhhhhhhhhhhh » Tout va bien.
Il me montre son agenda, tout est déjà fait, même ce qui est pour lundi. Il me dit qu’il n’aime pas certains de ses profs. Là je m’inquiète encore, oh non, il ne va pas encore attendre d’avoir créé un bon contact avec ses profs pour se mettre à travailler ? Zen Barbasucre enfin ! Je lui dis juste « mais ça va aller ? » Sourire radieux de Barbidul « mais bien sûr que ça va aller »
Il me raconte la prof d’anglais. Il ne l’aime pas, d’abord elle ne parle qu’en anglais. « Oui mais ça va, t’es fort en anglais ! » « Oh non ! attends je t’explique. Elle parle mal. Tu vois il faut dire comme ça : il me sort quelques phrases en anglais. Tain il est fort mon fils ! Elle parle comme ça : Il imite sa prof avec une patate exagérément chaude dans la bouche. « Oui ben elle insiste sur l’accent mais t’as tout compris quand même ! » « Oui mais je l’aime pas ! » « C’est pas grave, le principal c’est que tu ne sois pas largué »
Barbidoux rentre. Il a la même prof d’anglais. Le souci c’est qu’il n’a pas le même niveau en Anglais. Il a surtout retenu « No french » il répète ça en secouant la tête « comment je vais faire ? » « Ben le soir on travaillera ensemble et tu vas progresser et t’habituer » « D’accord, tiens faut que tu me fasses réciter, j’ai déjà une leçon d’histoire à apprendre. »
Il se plonge dans son cahier, fait taire son frère qui tente de le distraire, me tends le cahier. Il sait sa leçon. Il s’apprête à le ranger, je lui demande de me faire réciter. Il me regarde d’un air étonné. C’est pour entraîner ma mémoire et toi ça va consolider ce que tu viens d’apprendre de me poser des questions. « Ah ok » Il en profite pour me noter. 9 sur 10 il me met. Eh oh ! J’ai tout bien répondu ! Oui mais t’as pas utilisé les mêmes termes ! Pffff bon on va pas râler, il a travaillé de bon cœur et moi-même si j’ai de nombreux trous de mémoire, la mémoire flash marche encore, c’est déjà ça !
17h45 ils ont déjà tout rangé. J’en reviens pas. Vous voulez pas faire une petite prière avec moi pour que ça se passe toujours comme ça ?
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